Le spectacle et l’inflation : Précariser et divertir ??!!

 «Du pain et des jeux». La formule nous vient de l’Empire romain à une époque où les empereurs cherchaient à maintenir une certaine paix sociale, en fournissant à la population du pain gratuit et des divertissements spectaculaires.

Une formule qui visait l’amollissement de la volonté et l’abrutissement de l’esprit.  Ainsi, l’attention du peuple est entièrement détournée des problèmes politiques et sociaux. Car, un peuple diverti ne demanderait que davantage de plaisirs… Et pourtant, la formule n’a pas marché sur le long terme. C’est de l’histoire ancienne, dira-t-on, mais riche d’enseignements qui portent un éclairage sur le temps. Une réflexion sur le temps.

Que dire alors à propos des manœuvres orchestrées aujourd’hui, un peu partout dans le monde, surtout dans les pays les moins avancés (PMA) et les pays en voie de développement (PED), en maintenant l’offre des divertissements, mais en étouffant le pouvoir d’achat. Bref : Le spectacle et l’inflation. La précarité et les divertissements. Précariser et divertir ??!!  Quel paradoxe.

Le constat est là. Des conseils de communes urbaines et rurales s’investissent corps et âme et investissent à cor et à cri pour organiser des festivals, engageant des budgets importants, alors que des projets sociaux et culturels, structurés et structurants, peinent à se concrétiser.

De même, tous les ingrédients auraient été réunis pour que les jeunes s’éloignent de plus en plus de la politique et de la chose politique, désertent de plus en plus le paysage politique et culturel, abandonnent même l’école, rencontrent d’innombrables difficultés pour accéder au marché de l’emploi. Mais, en parallèle, la même recette rapproche les différents segments des divertissements de ces jeunes et leur offre des spectacles en accès libre. Une image artificielle est ainsi montée et balancée sur la Toile, montrant un public qui a le sens de la fête.

Il faut voir ces fans énergiques acclamant et célébrant la victoire de leur équipe ou son soutien en cas de défaite… c’est dire qu’il y aurait toujours une fête éclairée et amplifiée par les lumières du stade ou des ruelles, sans parler d’incidents violents et des dégâts occasionnés.

Ces jeunes, qui forment aujourd’hui l’ossature de ce public, seraient dans leur majorité pris en charge par leur famille, en leur assurant les frais des déplacements et des spectacles, mais plusieurs autres seraient manipulés par des «phénomènes électoraux» et des marchands de la rente, pour faire d’eux des «supporters» ou des figurants en vue de «meubler» l’espace des rencontres ou d’assister gratuitement à des compétitions exploitées à des fins électorales.

Sur le court terme, le public est ainsi assuré, mais sur le moyen voire le long terme, la recette en question ne pourrait entraîner qu’isolement et exclusion social. Autrement dit, des bombes sociales.

Par Docteur Belkassem Amenzou